Il n’y a pas que les vents qui font fondre l’Antarctique

Des changements dans les régimes des vents. C’est ce qui fait fondre l’Antarctique dans le contexte de réchauffement climatique. Mais des chercheurs remarquent aujourd’hui qu’un autre phénomène pourrait avoir son importance en la matière. Avec des conséquences sur l’élévation attendue du niveau de la mer.

Le rôle de l’eau chaude dans la fonte de l’Antarctique

Les chercheurs ont utilisé des outils avancés de modélisation. Ils se sont tout particulièrement intéressés au rôle de la couche d’eau chaude située sous les eaux glaciales de surface qu’ils nomment « eau profonde circumpolaire modifiée ». Car l’intensité et la trajectoire des courants océaniques encerclant les plateformes de glace déterminent directement l’afflux d’eau chaude et ainsi, leur taux de fonte.

Plus précisément encore, c’est la profondeur de l’interface entre les eaux profondes plus chaudes et les eaux de surface plus froides qui affecte considérablement l’afflux de cette eau chaude vers les plateformes. Et jusqu’ici, les scientifiques estimaient que l’intensification des vents d’ouest était responsable de cet afflux. Un phénomène particulièrement prononcé lors d’événements El Niño. Une autre équipe vient d’ailleurs d’en apporter d’autres preuves dans les Geophysical Research Letters.

Des interactions entre courants et fonds responsables de la fonte des glaces

Mais les derniers résultats publiés soulignent que l’interaction entre les courants océaniques sinueux et le fond océanique fait aussi remonter l’eau chaude. Par la suite, cette eau chaude atteint l’interface glace-océan, accélérant la fonte des plateformes de glace. De quoi amener les chercheurs à envisager une réévaluation de l’impact des vents sur la fonte des plateformes de glace de la mer d’Amundsen et les projections d’élévation du niveau de la mer pour le futur.

L’océan fait fondre l’Antarctique par dessous

Article de Delphine Bossy paru le 21/06/2013

Les bruyants et impressionnants vêlages de glaciers aux pôles semblaient contribuer majoritairement à la perte de masse des calottes glaciaires : c’est ce que l’on pensait jusqu’ici. Faux, affirme une équipe américaine. La fonte des plateformes glaciaires serait plutôt provoquée par les courants océaniques.

L’Antarctique est une immense calotte où la glace est en perpétuel mouvement. Par endroits, les glaciers s’écoulent depuis le continent sur la mer et forment d’immenses plateformes glaciaires flottantes. Il en existe dix principales en Antarctique, dont deux ayant une superficie de l’ordre de celle de la France. Aux extrémités de ces plaques, les icebergs se forment. Jusqu’alors, la principale cause de perte de masse de la calotte glaciaire était attribuée aux impressionnants vêlages de glaciers. La formation des icebergs engendre, en effet, la perte de 1.089 gigatonnes (Gt) de glace par an.

Or, un phénomène bien plus discret ferait perdre davantage de glace encore que la formation d’icebergs : la fonte par la base des plateformes glaciaires. Dans certaines zones, les courants océaniques sont plus chauds et font entrer en fusion la glace basale. D’après une nouvelle étude, menée par l’équipe du chercheur Eric Rignot, les courants océaniques seraient ainsi responsables de 55 % de l’ablation des glaciers.

Les résultats, publiés dans la revue Science, révèlent que la moitié de l’eau de fonte provient de dix petites plateformes glaciaires flottantes qui n’occupent que 8 % de la surface totale de l’Antarctique. Les deux plus grands plateaux, Ross et Filchner-Ronne, qui couvent pourtant les deux tiers des plateaux, ne contribuent que pour 15 % de la fonte totale. Les plateformes ralentissent la propagation de la glace continentale vers la mer, ainsi « si elles s’amincissent et disparaissent, la glace continentale accélérera son mouvement vers la mer », commente Eric Rignot.

L’Antarctique ne fond pas plus pour autant

L’année dernière déjà, des chercheurs avaient émis l’idée que les courants océaniques pilotés par le vent pourraient avoir un rôle plus important dans la fonte des glaces antarctiques que ce que l’on pensait. L’étude de l’équipe d’Éric Rignot est la première à rassembler des informations de terrain récentes et les dernières données d’imagerie satellite. Grâce à elles, les chercheurs ont pu identifier plus clairement les interactions entre la calotte polaire et son environnement.

Le fait que la contribution des océans ait été largement sous-estimée dans la fonte des plateformes glaciaires ne signifie pas que la fonte totale de l’Antarctique serait plus importante. S’il est vrai que dans certaines régions les plateaux glaciaires sont plus minces, ils se sont épaissis dans d’autres. En revanche, ces nouveaux résultats mettent en évidence les interactions océan-atmosphère des calottes que les modèles climatiques ne simulent pas correctement.

D’après l’étude, le taux de fonte basal engendré par les courants océaniques est de 1.352 Gt par an. Sachant cela, les modèles climatiques pourront être réajustés, mais le plus gros du travail reste encore à faire. La clé du problème consiste à comprendre comment ces taux de fonte basale influenceront au fil du temps la topographie du plancher océanique et la circulation océanique. Actuellement, l’équipe américaine construit une base de données d’observation qui, sur le long terme, aidera à cerner les processus en jeu. L’objectif ultime étant d’améliorer la précision des équations que les modèles numériques résolvent. 

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