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D’improbables efflorescences de plancton pourraient alimenter des écosystèmes polaires cachés

 

Deux nouvelles études révèlent l’existence d’efflorescences de phytoplancton dans les profondeurs de l’océan Arctique et sous la glace de mer en Antarctique. Favorisées par le réchauffement climatique, ces proliférations pourraient constituer la base d’une chaîne alimentaire inconnue.

Dans les océans, le phytoplancton – constitué d’algues microscopiques qui, à l’instar des plantes sur la terre ferme, réalisent la photosynthèse – constitue la base des réseaux trophiques (chaînes alimentaires imbriquées les unes dans les autres). Lorsque le phytoplancton se multiplie, on parle “d’efflorescence” (bloom, en anglais), parfois visible depuis l’espace sous forme d’une nappe verte.

Nutriments et lumière : l’équation de la photosynthèse

Ce phénomène spectaculaire n’a lieu que sous deux conditions. D’une part, il faut des nutriments en abondance dans l’eau. Et d’autre part, la lumière du soleil s’avère cruciale, puisque c’est elle qui fournit l’énergie nécessaire à la synthèse de matière organique.

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Si les régions polaires satisfont en permanence au premier critère, grâce à des eaux toujours riches en nutriments, en revanche, le contexte lumineux varie en fonction des saisons. Ainsi, pendant les mois d’été (juin à août en Arctique, décembre à mars en Antarctique), l’épaisseur de la glace de mer est à son minimum, et les rayons du soleil peuvent donc atteindre une plus grande partie de la surface de l’océan, favorisant les efflorescences de phytoplancton.

En hiver, au contraire, la glace s’épaissit et ne laisse quasiment plus filtrer la lumière. Non seulement le phytoplancton ne peut se reproduire, mais il finit même par mourir. Mais les choses pourraient être en train de changer, selon deux nouvelles études publiées respectivement par des équipes japonaise et américano-néozélandaise dans les revues scientifiques Global Change Biology (9/2022) et Frontiers in Marine Science (11/2022), et relayées par LiveScience.

Une vie marine insoupçonnée

Le premier article révèle qu’une partie du phytoplancton survit en profondeur même après l’épaississement de la glace de mer en Arctique, et ce, bien que la quantité de lumière disponible atteigne seulement 1 % de celle mesurée en surface. Le second article, lui, témoigne d’une efflorescence qui précède la fonte estivale en Antarctique, les auteurs suggérant qu’au moins la moitié de la zone recouverte de glace pourrait abriter de telles proliférations.

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Pour les auteurs, il existerait des écosystèmes cachés, au sein desquels le phytoplancton alimenterait toute une vie marine jusqu’ici insoupçonnée. “Les niveaux trophiques supérieurs (prédateurs, NDLR) migrent vers les zones de productivité, et si celles-ci se trouvent sous la glace, on peut s’attendre à ce que le réseau trophique suive”, a déclaré dans un communiqué l’auteur principal de l’étude américano-néozélandaise, Christopher Horvat, océanographe à l’université Brown de Rhode Island (Etats-Unis).

Des prélèvements et analyses supplémentaires seront nécessaires pour mesurer l’ampleur de la photosynthèse réalisée lors de ces efflorescences inattendues. En Antarctique comme en Arctique, le réchauffement climatique pourrait jouer un rôle clé, en réduisant l’épaisseur de la glace de mer, en augmentant la durée pendant laquelle les océans sont libres de glace, et en augmentant la quantité de lumière solaire qui atteint les eaux plus profondes.

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Ces deux études pourraient par ailleurs conduire à ré-évaluer le rôle des régions polaires dans le cycle du carbone. En effet, le phytoplancton capte le CO2 dissous dans l’eau pour synthétiser de la matière organique, qui finit par sombrer au fond des océans après la mort des organismes. Ce stockage pourrait donc s’avérer – localement – encore plus important que prévu.

Détails

Statut de publication :
Sciences, Réchauffement climatique

Auteur(e):
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Date:

Journal/Source:
Geo Magazine, www.geo.fr

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